Archives par auteur Sara Maslouhi

Habiter le Paddington Meadows

La figure du parc de l’entre-deux métropoles s’inscrit dans l’idée d’un paysage en mouvement et de la réversibilité de ses composantes. Les sites d’enfouissements deviennent des parcs, les anciennes voies ferrées deviennent le support d’une nouvelle trame forestière. Regarder le paysage en y voyant les anciennes pratiques qui l’ont façonné, est finalement une attitude prospective à qui la crise du coronavirus donne un écho actuel. 

Dans le quartier de Poulton South, le site de Paddington Meadows est au contact direct d’un bras artificiel de la Mersey, le Woolston New Cut Canal, qui permit à la ville de connaître un développement industriel. Le lieu accueillait l’usine de Paddington Chemical Works spécialisé d’abord dans le savon puis dans la colle avant de devenir un site d’enfouissement. Cette deuxième activité a contribué au remodelage du terrain, qui s’est accentué quand le site devint un parc ouvert au public.

Aujourd’hui, le tissu urbain de Poulton South est essentiellement pavillonnaire, et malgré le retrait de l’industrie et la montée des eaux, la ville s’étale. Afin de protéger les habitants, un mur contre les eaux fut construit en 2013 entre le Woolston New Cut Canal et les logements pavillonnaires adjacents, cependant, celui-ci n’a pas pu contenir les eaux lors de l’inondation qu’a connue la ville le 9 février dernier. Le projet s’inscrit donc dans l’accompagnement de cette urbanisation et propose des logements offrant un nouveau rapport au paysage, au site et à ses crues.

À Poulton South, la temporalité du paysage est rythmée par les crues de la Mersey, avec comme point d’orgue la possible montée des eaux due au réchauffement climatique. Face à cette menace, les habitants ont pour eux l’expérience d’habiter en zone inondable. Pourtant, en acceptant dès maintenant la présence de l’eau, la ville accepte cette transformation majeure du paysage et devient donc résiliente. Le risque est alors l’opportunité d’une ville sur l’eau, d’une Venise de briques, d’un paysage où les talus sont devenus îles.

Le projet se construit autour de nombreux questionnements. Comment rendre l’eau tolérable et faire d’une contrainte une opportunité ? Comment créer une zone de résilience sur le water front de la réserve de Paddington Meadows ? Comment aménager un territoire résilient dans l’incertitude d’un paysage en devenir ? Et que veut dire habiter dans un tel milieu ?