











Etat des lieux
L’entité paysagère de Woolston se qualifie en premier lieu par sa dimension conséquente (92 ha). Elle annonce l’amorce d’une péninsule souffrant d’un isolement plus important que le reste de du parc métropolitain de l’entre-deux ville. Le paysage de cette péninsule est marqué par de nombreux ouvrages d’art importants tels que le viaduc autoroutier de Thelwall construit en 1995, ou le bras de la Mersey contournant le barrage de Woolston Lock, sans compter bien évidemment le Manchester Ship Canal formant la frontière sud de celle-ci. Ces grandes infrastructures sont des éléments marquant du paysage, racontant tout le pouvoir que l’homme peut exercer sur son environnement dans son histoire.
Ce site est l’un des lieux d’évacuation des dépôts de dragage les plus important le long du Manchester Ship Canal. Ce dragage des sédiments s’accumulant sur le lit du canal doivent continuellement se poursuivre, afin de maintenir un tirant d’eau suffisant pour le transport fluvial. A Woolston Deposit Grounds, Cinq de ces nombreux épisodes de dragages ont donc largement métamorphosé le paysage et le relief. L’héritage de ces nombreux dragages successifs prend la forme d’un immense plateau de sédiments, recouvert d’une végétation persistante.
En dépit d’un décret ministériel autorisant toujours cette pratique en son périmètre, nous pouvons d’ores et déjà estimer que le site ne remplira plus sa fonction de stockage de sédiments à court terme. En effet, les sédiments de dragages sont aujourd’hui majoritairement rejetés dans la mer d’irland. Face aux nouvelles méthodes d’évacuation des terres de dragage, Nous pouvons ainsi considérer l’altitude de ce site comme à son apogée, tel le vestige d’une pratique d’un enfouissement aujourd’hui totalement invisible.
Cette entité paysagère fait aussi face à une extension urbaine, s’agglomérant en périphérie du quartier de Westy dans la commune de Latchford. Cette urbanisation prend la forme des modèles pavillonnaire anglais. Cette forme d’étalement urbain ignore d’ores et déjà les risques sanitaires liés à cette situation singulière ainsi que les dangers liés à l’oubli de cet ancien site d’enfouissement, en empiétant déjà sur ces terres.
Comme l’énonce Cédric Price, l’architecture est trop lente dans sa réalisation pour être un véritable « résolveur de problèmes » . Ce projet n’a pas l’ambition de trouver une alternative au stockage des sédiments de dragages, car d’une certaine manière, nous faisons déjà face aux déboires de cette méthode. Il prendra plutôt le parti de s’emparer du devenir de cet ancien site de stockage en prenant en considération les réelles dimensions de son lourd héritage.
Construire à l’apogée sédimentaire
Enjeux
De part sa proximité forte avec le tissu urbain de Warrington ayant franchi la Mersey, l’ouverture à terme de ce site au public demeure la condition primordiale de l’existence du parc métropolitain.
Cette condition fait face, dans un premier temps, à un enjeu sanitaire. En effet à Woolston, nous ignorons la compositions du sol issue des dragages successifs d’un canal dont nous savons aujourd’hui son caractère extrêmement pollué. Le projet fait donc face à une inconnue sanitaire connue.
Dans un second temps, la réouverture de ce site au public implique un enjeu de visibilité. En effet, ce site étant anciennement le lieu d’un enfouissement, son existence est aujourd’hui ignorée de la majorité de la population. Les quelques visiteurs actuels hormis les promeneurs locaux, viennent de manière illégale afin profiter du caractère invisible du site, en se débarrassant de leurs propres déchets.
Redonner une visibilité de ce site à grande échelle participerait donc à lui rendre culturellement sa dignité.
Réponse architecturale
La réponse architecturale et paysagère formulée face à ces divers enjeux établis trouve sa morphogenèse dans le processus de sédimentation, un processus à l’œuvre sur ce site depuis l’apparition du canal. Cette sédimentation s’opère selon une méthode spécifique: Des bermes de stabilisation apparaissent dans un premier temps, formant une enceinte de terre, en mesure de contenir les sédiments dragués. Ces sédiments sont d’abord stockés progressivement depuis haut du talus d’enceinte en formant une rampe progressive. Cette rampe permet aux engins d’accéder au niveau du lit du site d’enfouissement afin de poursuivre le stockage en périphérie, au pied de l’enceinte.
En réponse à ce processus sédimentaire, un choix de matériau s’impose comme une évidence: celui de la terre. L’usage de la terre a su, durant plusieurs millénaires, défier l’entropie, l’érosion, c’est-à-dire la flèche du temps. Cette ressource souffre pourtant aujourd’hui d’une image de précarité. Nous savons pourtant que la terre est une ressource digne des édifices les plus monumentaux.
Nous savons aujourd’hui que les sédiments de dragages sont en mesure de substituer certains composants de matériaux de construction tel que la brique. Faire l’usage de cette matière, c’est lui rendre une certaine dignité et donc une manière de trouver une nouvelle représentation du territoire sur lequel nous intervenons.
Le Roi d’Egypte Asychis, cité par Hérodote, avait fait construire près du Caire une pyramide en terre et y avait apposé l’inscription suivante :
« Ne me méprise pas en me comparant aux pyramides de pierre, je suis autant au dessus d’elles que Jupiter est au-dessus des dieux, car j’ai été bâtie en briques faites avec le limon du fond du lac. »
L’architecture du projet prend donc le parti de s’emparer de ce matériau, en travaillant selon l’archétype du Zigurat Mésopotamien. Cet archétype consiste en la fabrication d’enceintes successives maconnées dont l’intérieur remblayé sert d’appui pour l’enceinte suivante. Ce processus génère un relief en gradin. il répond ainsi architecturalement à un enjeux paysager, lié au site d’enfouissement, et programatique, lié à la pratique des courses hippiques.
La toiture de l’édifice intervient selon une autre temporalité, plus immédiate. Le bois est le matériau le plus proche de nous en terme de temporalité. Son usage répond aux besoins immédiats de l’hippodrome, c’est à dire de s’abriter, tout en assurant une certaine transparence visuelle lors du déroulement des courses.



